Le père de Snake ne retournera pas dans la jungle. Dans une récente interview accordée à SSENSE, Hideo Kojima a confirmé qu’il ne touchera pas à Metal Gear Solid Delta: Snake Eater, le remake du mythique MGS3 actuellement en développement chez Konami. Une réponse brève, lâchée avec un sourire : « Non, je ne le jouerai pas ». Le message est clair : Kojima a définitivement tourné la page de la saga qui a marqué sa carrière et l’histoire du jeu vidéo.
Depuis son départ houleux de Konami en 2015, le créateur japonais n’a jamais caché son amertume. Après l’annulation brutale du projet P.T. et la sortie controversée d’un Metal Gear Solid V: The Phantom Pain incomplet, Kojima a fondé son propre studio, Kojima Productions, avec l’ambition de créer des œuvres originales, affranchies des chaînes de licences anciennes.

Si Konami tente aujourd’hui de ressusciter la licence Metal Gear sans son créateur – un pari audacieux pour un jeu aussi culte que Snake Eater – Kojima, lui, regarde ailleurs. À 61 ans, il se concentre sur de nouveaux horizons créatifs, plus personnels, plus risqués.
Au fil de l’entretien, Kojima ne s’est pas contenté d’éluder le remake : il a aussi livré une critique acerbe de l’état actuel du jeu vidéo AAA. Selon lui, les blockbusters sont devenus « trop coûteux, trop longs à produire et trop formatés ». Il s’est notamment montré déçu par le manque de prise de risque constaté lors du dernier Summer Game Fest, où « tous les jeux montraient des gens qui se battent contre des aliens ou des monstres médiévaux ».
« Même les visuels et les mécaniques sont devenus interchangeables », déplore-t-il. Ce constat, Kojima ne le jette pas par mépris, mais par conviction : « Il faut remettre du neuf, du bizarre, de l’inédit » pour faire évoluer le médium. Et pour lui, c’est du côté des studios indépendants que se cache aujourd’hui la véritable audace créative.

Kojima confie par ailleurs passer de moins en moins de temps à jouer. Ce qui le nourrit aujourd’hui ? L’art contemporain. Il puise son inspiration dans les musées, les expositions, les œuvres qui cassent les frontières entre spectateur et créateur — un parallèle évident avec son propre travail, souvent hybride, parfois déroutant.
Pendant que Konami ressuscite Snake sans son géniteur, Kojima prépare l’avenir. Deux projets sont déjà en chantier chez Kojima Productions : Physint, un jeu d’action-espionnage décrit comme un « pont » entre cinéma et jeu vidéo, et OD, une expérience narrative atypique réalisée en collaboration avec Xbox Game Studios, pensée pour bousculer les habitudes et diviser le public. Fidèle à lui-même, Kojima ne cherche pas le consensus, mais le choc.




