Pendant des années, Grand Theft Auto a semblé appartenir à un seul territoire : celui de PlayStation. Les épisodes cultes sortaient d’abord – parfois exclusivement – sur les machines de Sony, laissant Microsoft en simple spectateur. Pourtant, au tournant de la Xbox 360, un événement va bouleverser cet équilibre.
Dans un entretien accordé à Eurogamer, l’ancien dirigeant de Xbox Peter Moore revient sur ce moment décisif où Microsoft a dû convaincre Rockstar que la Xbox n’allait pas échouer.
Avant la 360, Rockstar ne croyait pas vraiment en Xbox

Au début des années 2000, Microsoft n’était pas encore un pilier de l’industrie console. Face à Sony et Nintendo, la marque Xbox restait jeune, fragile, presque expérimentale. Pour un éditeur comme Rockstar, dont chaque décision pesait des millions, investir du temps dans une plateforme incertaine n’allait pas de soi.
Selon Peter Moore, alors patron de la division Xbox, les discussions avec Rockstar étaient tendues, presque vitales. La question était simple, mais brutale : La Xbox sera-t-elle encore là dans cinq ans ?
Rockstar craignait d’allouer ses équipes, déjà très sollicitées, à des kits de développement Xbox si la machine finissait par disparaître dans l’ombre de la PS3.
“Ils avaient besoin d’être sûrs que leurs développeurs ne travailleraient pas pour rien. Si la Xbox faisait un flop, ils auraient perdu des ressources précieuses.”
Peter Moore
Microsoft devait donc prouver sa solidité, sa vision, mais surtout sa capacité à transformer Xbox en une plateforme durable. Une bataille diplomatique, presque psychologique.
GTA 4 : le jour où tout a basculé

Après des mois de négociations, Rockstar finit par céder. Le gigantesque chantier GTA 4 est validé pour une sortie simultanée sur Xbox 360 et PS3, une première absolue pour la licence. Ce n’était pas un simple deal commercial. C’était une déclaration d’intention : Xbox ne jouait plus dans la cour des outsiders.
À l’époque, l’événement fut perçu comme une victoire stratégique majeure pour Microsoft. Peter Moore, fidèle à son tempérament extraverti, ira même jusqu’à se faire tatouer pour célébrer l’accord – un geste devenu mythique parmi les équipes Xbox.
Une confiance gagnée… et jamais perdue

Le pari a payé. GTA 4 a confirmé la solidité de la Xbox 360, qui resta l’une des consoles les plus populaires de sa génération. Depuis cet épisode, Rockstar a systématiquement lancé ses productions majeures sur Xbox et PlayStation en même temps.
Et la tradition se poursuit : GTA 6 arrivera d’abord sur PS5 et Xbox Series, sans version PC au lancement. Une réalité devenue évidence… mais qui n’a rien d’automatique. Sans ce travail de persuasion mené il y a vingt ans, la relation entre Microsoft et Rockstar aurait pu suivre un tout autre chemin.
L’arrivée de GTA sur Xbox n’a pas seulement permis à Microsoft d’enrichir son catalogue.
Elle a renforcé la crédibilité d’une marque alors en quête d’identité et propulsé la Xbox 360 dans une mécanique de succès qui dure encore aujourd’hui.
Derrière ce partenariat devenu naturel se cache une lutte intense, des négociations serrées, et la détermination d’une équipe persuadée que la Xbox avait sa place dans l’histoire du jeu vidéo.
À l’arrivée, Rockstar a fait le bon choix. Et Microsoft, lui, a gagné l’un de ses combats les plus symboliques.
